Bénin 2026Choix de la rédactionFaits vérifiés

[Faits vérifiés] Bénin – Assemblée nationale : NON, la démission d’un député de son parti n’entraîne pas la perte de son siège

[Faits vérifiés] Bénin - Assemblée nationale : NON, la démission d’un député de son parti n’entraîne pas la perte de son siège

Un député démissionnaire de son parti politique cesse-t-il ipso facto de siéger au parlement ? C’est la question au centre d’une publication sur les réseaux sociaux au Bénin dans le contexte de la démission de six élus du parti d’opposition Les Démocrates. Mais contrairement à ce que prétend la publication, un député ne perd pas son siège en raison de sa démission de son parti politique. Décryptage.

Le samedi 1er novembre 2025, la page Facebook Béninmédias postait un texte dans lequel était posé un “débat juridique” après la démission des députés du parti Les Démocrates (LD). Selon la publication, les élus démissionnaires de leur parti, devaient par voie de conséquence perdre leur poste de député. A l’appui de l’affirmation, un supposé article 17 du Code électoral (Loi 2019-43) : “Tout député qui démissionne de son parti politique perd automatiquement son siège à l’Assemblée nationale” (une fausse citation, comme démontré ci-dessous

Selon les auteurs du texte publié par Béninmédias, “Concrètement, un député élu sous l’étiquette d’un parti ne peut pas continuer à siéger comme indépendant après avoir quitté cette formation. Sa démission entraîne la perte automatique du siège,  la convocation de son suppléant, et la préservation de la stabilité politique au sein de l’Assemblée”.

Il est aussi évoqué le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale du Bénin qui ne reconnaîtrait pas un statut à des députés “non-inscrits issus d’une démission”.

Rappel du contexte

Le vendredi 31 octobre 2025, à l’ouverture de la nouvelle session ordinaire du parlement, six députés députés LD (Michel Sodjinou, Constant Nahum, Denise Hounmènou, Chantale Adjovi, Leansou Do Rego et Joel Godonou) annoncent leur démission de leur groupe parlementaire, réduisant celui-ci à 22. Plus tard au cours de la même journée, les élus concernés officialisent leur démission de leur parti politique. 

Leur démission intervient dans un contexte de crise interne au parti Les Démocrates, entraînant l’invalidation du dossier de son duo candidat à l’élection présidentielle d’avril 2026. Un député, Michel François Sodjinou, a refusé d’accorder son parrainage au candidat désigné par son parti LD. 

Le dissident est l’un des élus des dernières élections législatives qui ont eu lieu le 8 janvier 2023 conformément à la réforme constitutionnelle de 2019 qui a fixé la date de ces élections aux mois de janvier de l’année électorale. Sept partis s’étaient affrontés dans les urnes. A l’arrivée, trois d’entre eux étaient éligibles au partage des 109 sièges du parlement : l’Union Progressiste le Renouveau, 53 sièges, et 28 sièges pour le Bloc Républicain et pour Les Démocrates, parti d’opposition qui faisait son entrée au parlement. 

Au lieu de 5 ans, la durée du mandat de cette législature est fixée à trois ans exceptionnellement afin de faire coïncider dès 2026 l’année de début de tous les mandats des gouvernants élus (conseillers communaux, députés et président de la République).

Qu’est-ce qu’il s’est passé depuis les démissions ?

Les députés démissionnaires de leur groupe parlementaire à l’Assemblée nationale sont désormais non-inscrits. Comme le prévoit le règlement intérieur du parlement. 

Ils ont ainsi changé de rangée au sein de l’hémicycle à la suite de la lecture de toutes les notifications de démission lors de la cérémonie d’ouverture de session, quittant l’espace des LD pour celui réservé aux députés non-inscrits. 

Ce que disent les textes

Trois principaux textes régissent la fonction de député au Bénin. Il s’agit de la Constitution, du code électoral et du règlement intérieur du parlement.

Selon la Constitution, la loi suprême qui régit l’organisation de l’Etat, “le Parlement est constitué par une assemblée unique dite Assemblée nationale, dont les membres portent le titre de député. Il exerce le pouvoir législatif et contrôle l’action du  Gouvernement” (article 79). Il est aussi précisé que “les députés sont élus au suffrage universel direct. La durée du mandat est de cinq ans renouvelables deux fois. Chaque député est le représentant de la Nation tout entière et tout mandat impératif est nul” (article 80 nouveau).

Quant au code électoral, il précise entre autres, les conditions d’élection des députés et de cessation de leurs fonctions. Ainsi d’après la loi, une fois élus, les députés s’organisent au parlement en groupes parlementaires selon leurs partis.

Le règlement intérieur de l’Assemblée nationale prévoit : 

“Un député ne peut faire partie que d’un seul groupe parlementaire. Tout député qui démissionne d’un groupe parlementaire reste non-inscrit jusqu’à la fin de la législature“ (24.3 du règlement intérieur). 

Par contre, la démission du député de son parti d’origine n’a pas de conséquence prévue par la loi.

En tout cas, elle n’entraîne pas la démission de l’Assemblée nationale au profit de son suppléant. En effet, une rupture d’un député avec son parti ne figure pas parmi les motifs légaux qui entraînent la suppléance. Celle-ci intervient dans l’une des conditions fixées à l’article 149 du Code électoral :  

  • en cas de décès
  • en cas de démission du mandat
  • en cas d’empêchement définitif
  • en cas d’incompatibilité légale

 “Lorsqu’une vacance isolée se produit par décès, démission, ou empêchement définitif, le candidat suppléant personnel est appelé par le président de l’Assemblée nationale à exercer le mandat pour le reste de sa durée. Tout député nommé à une fonction publique ou appelé à une mission nationale ou internationale, incompatible avec l’exercice de son mandat parlementaire, suspend d’office celui-ci. Son suppléant est appelé par le président de l’Assemblée nationale à siéger. Sa suppléance cesse à sa demande.” (Article 149 du code électoral).

Ce qu’il faut retenir

La loi prévoit le remplacement de tout député par son suppléant personnel mais à des conditions strictes fixées à l’article 149 du Code électoral cité. La démission du député de son parti politique sous la bannière de laquelle il a été élu ne figure pas dans ces conditions.

De plus, le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale autorise la démission de tout député de son groupe parlementaire ; il devient dans ce cas un élu “non-inscrit” jusqu’à la fin de la législature.

Les députés LD démissionnaires de leur parti continuent de siéger comme élus de la nation comme le permet la loi. 

En définitive, la supposée base légale du raisonnement de Beninmedias, ressemble plus à une invention qu’à autre chose. Car contrairement à ce qui y est écrit, l’article 17 du Code électoral béninois est plutôt relatif à la liste électorale : “L’Agence nationale d’identification des personnes (ANIP) transmet à la CENA, la liste électorale informatisée (LEI), au plus tard, soixante (60) jours avant la date du scrutin. La liste électorale informatisée est publiée quinze (15) jours avant sa transmission à la CENA.”

Retrouvez toute l’actualité des élections générales de 2026 sur ici : Bénin 2026 – SRTB

Articles similaires

Bénin : vers la création d’une IA qui parle les langues nationales

Stanislas Linkpon

Candidatures aux élections communales 2026 : trois partis retenus pour la phase de l’étude de conformité

SRTB

Législatives 2026 : le dépôt des dossiers de candidature repoussé d’une semaine

SRTB
Chargement....