Au Bénin, alors que les musulmans observent le mois sacré du Ramadan depuis le 1er mars 2025, le Carême a démarré chez les fidèles catholiques ce 05 mars. Une coïncidence rare et significative qui marque le calendrier spirituel cette année.
C’est une occasion unique dans un pays où diverses religions se côtoient. Durant des semaines, musulmans et chrétiens catholiques vont partager une même ferveur, un même engagement et une même quête spirituelle : 30 jours de prières, de privations chez les musulmans et 40 jours de Carême pour les catholiques.
Le jeûne est le quatrième pilier de l’Islam. “De l’aube au coucher du soleil pendant un mois entier, tout le corps observe le jeûne”, rappelle El hadj Youssouf Ligaly, 2ème vice imam de la mosquée centrale de Cadjehoun à Cotonou et auteur de l’ouvrage Dialogue interreligieux qu’en dit l’Islam Tome 01.
Pendant le Ramadan, la foi doit rester inébranlable. La prière et la charité s’accentuent. Les fidèles s’abstiennent d’écouter la musique vulgaire, les paroles futiles ou de prononcer les mots grossiers. C’est un moment de purification selon El hadj Youssouf Ligaly :
“Allah dit: On ne poursuit pas ce dont tu n’as aucune connaissance. L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, on sera interrogé. Coran chapitre 17 verset 36”
Même appel au renoncement aux péchés, à la prière et au partage pour les chrétiens catholiques durant le Carême. La communauté catholique romaine observe quarante jours de privations et d’introspection, en préparation à la fête de Pâques.
C’est le moment le plus important de l’année pour la sanctification du chrétien, insiste l’abbé Victor Gninou, prêtre de l’église Catholique à dans le Couffo :
“Le temps du Carême est un moment fort de conversion intérieure, un temps de purification et de combat spirituel pour vaincre le péché avec pour objectif, la passion, la mort et la résurrection de Jésus-Christ à Pâques. Pour ce faire, trois moyens essentiels nous sont proposés : la prière, le jeûne et l’aumône. Seulement, nous rappelle le Christ, nous devons les vivre de l’intérieur et non, pour nous donner en spectacle pour plaire aux hommes.”
Cohabitation religieuse harmonieuse
Cette convergence spirituelle renforce le vivre-ensemble. Dans les familles béninoises, où les appartenances religieuses sont souvent mixtes, cette double période de jeûne se vit dans la solidarité et le respect. “Mon mari est musulman et je suis catholique. Chacun pratique sa foi, mais nous nous soutenons mutuellement. Le matin, je fais le repas. Mon mari se lève tôt pour le repas avant l’aube”, raconte Aline, une jeune mariée résidant à Abomey-Calavi.
Les lieux de culte s’inscrivent aussi dans cette dynamique de respect mutuel. De nombreuses mosquées et églises encouragent leurs fidèles à promouvoir la paix et l’entraide en cette période. “Lors des prêches, nous exhortons les fidèles à être tolérants et à accepter les uns et les autres puisque nous sommes les mêmes”, assure Youssouf Ligaly.
Pour l’abbé Victor Gninou cette occasion unique illustre la convergence des valeurs. C’est un appel divin une cohabitation plus harmonieuse pour la gloire de l’Eternel :
Abbé Victor Gninou
“Cette coïncidence du Ramadan et du Carême est un signe fort de la Providence. Elle nous rappelle que malgré nos différences, nous sommes unis par des valeurs communes : la foi, l’amour du prochain et la quête de spiritualité. Nous devons nous unir davantage à travers le Dialogue interreligieux et œuvrer ensemble pour la paix dans le monde.”
Cette convergence spirituelle invite donc à la solidarité et au dépassement des divisions, malgré la diversité religieuse. La Loi fondamentale du Bénin insiste d’ailleurs sur la laïcité du pays tout en prônant la coexistence pacifique.